8 Juillet 2015
A l’occasion d’un dossier récent, j’ai eu l’occasion d’une piqûre de rappel sur la durée de la détention provisoire en matière correctionnelle, qui m’a incliné à la rédaction de cet article.
On le sait, les textes applicables en la matière rappellent sans cesse le caractère exceptionnel de la détention provisoire, son caractère subsidiaire par rapport au contrôle judiciaire et plus les textes le rappellent, moins les magistrats en tiennent compte.
Le recours quasi systématique au mandat de dépôt, entorse suprême au principe de respect de la présomption d’innocence, est une donnée acquise que seule une bonne dose d’angélisme ou de mauvaise foi judiciaire permettrait de remettre en cause.
Mon client, à l’occasion d’une bagarre en boîte de nuit, blesse ses trois assaillants à l’aide d’une arme blanche.
Une instruction est ouverte pour violences avec arme, il est présenté au Juge des libertés et de la détention qui le place sous mandat de dépôt pour une durée de 4 mois.
Je suis désigné au stade du renouvellement et je sollicite le placement sous contrôle judiciaire assorti d’une surveillance électronique, qui m’est refusé.
Le mandat de dépôt est renouvelé et il faudra attendre le passage devant la Chambre de l’instruction pour que mon client soit mis en liberté, sans même un contrôle judiciaire, puisque le renouvellement prononcé par le Juge des libertés et de la détention, sur demande du Parquet et du Juge d’instruction en charge de l’affaire, est impossible juridiquement.
En effet, l’article 145-1 du Code de procédure pénale pose des conditions strictes quant à la durée maximale d’un mandat de dépôt. En matière correctionnelle, le mandat ne peut pas excéder 4 mois si le mis en examen, cumulativement :
Dans notre affaire, mon client encourt 5 années d’emprisonnement (violence aggravée par une circonstance, l’usage d’une arme) et son casier judiciaire ne porte trace que de petites mentions pour délit routier ou non paiement de pension alimentaire, il n’a jamais été condamné à une quelconque peine d’emprisonnement, encore moins égale ou supérieure à un an.
Le mandat de dépôt ne peut donc tout bonnement pas être renouvelé à l’expiration des 4 mois.
Tout aveuglés par leur volonté de maintenir en détention provisoire le mis en examen comme à l’accoutumée, ni le Juge d’instruction, ni le Procureur de la République, ni le Juge de la détention ne se sont interrogés sur la réunion des conditions légales de ce renouvellement.
Le pire était encore à venir, car quand j’ai eu l’occasion d’en parler avec l’un de ces trois magistrats, la seule réponse qui m’a été faite fut « nous aurions dû ouvrir au criminel pour tentative de meurtre, au moins nous aurions disposé d’un mandat de dépôt d’un an sans avoir à renouveler tous les 4 mois… »
Faut-il rappeler que le juge judiciaire est garant des libertés fondamentales ?...