Pensées d’un avocat de la défense devant la Cour d’assises en 2020

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Je suis devant une cour d’assises au moment où j’écris ces lignes.

Je supporte depuis 1 heure 20 l’amoncellement disparate de lieux communs poussifs ânonnés par un avocat de partie civile qui s’est égaré à un point tel que je crains qu’il ne retrouve plus son chemin.

Encore un peu et, à la prochaine suspension, c’est derrière le pupitre de l’Avocat Général qu’il va chercher la sortie de la Cour.

Je crains qu’il n’y parvienne pas tout à fait, car j’observe d’ici le regard noir dudit Avocat Général qui est excédé par le comportement de cet « avocat », qui au vrai s’est mué en caricature d’accusateur public, au point que la comparaison en devient même injurieuse pour le vrai procureur de ce procès criminel.

C’est le troisième procès d’affilée où je constate qu’un avocat de partie civile plaide plus longtemps, beaucoup plus longtemps que la plupart des avocats de la Défense.

Et comme la mode est à la multiplication des parties civiles, à la multiplicité d’avocats pour les assister ou représenter, je m’aperçois que depuis quelques temps, obtenir une heure à une heure et demie d’attention de la Cour d’assises devient compliqué, autant pour l’avocat général que pour moi, quand on a dû passer une demie journée à écouter des parties civiles nous égrainer tout ce que les accusés ont fait de mal de leur vie, tout ce qu’il vont faire plaider d’honteux par leurs avocats qui, eux, ne sont pas des avocats commis d’office, oh non, parce qu’ils ont les moyens de se payer les avocats les plus chers du moment…

Ah, je vous laisse, après 1 heure 30 de simili réquisitoire, l’avocat de la partie civile vient d’évoquer son client. Je vois que les jurés somnolent, que plus personne ne porte attention à ce qui se dit alors que l’on évoque la vie de la victime. C’est dommage, à s’égarer ainsi on finit par égarer aussi les autres…