28 Janvier 2013
Le jeune H. est poursuivi devant la Cour d'Assises de la Vienne pour 3 agressions dont deux viols.
Il a déjà été condamné en cours d'instruction à une peine de 5 ans d'emprisonnement par un Tribunal pour Enfants pour un autre viol commis antérieurement, alors qu'il était âgé de seulement 15 ans.
Il encourt pour ces viols commis en concours une peine de 20 ans de réclusion, 10 en tenant compte de l'excuse de minorité dont il bénéficie automatiquement compte tenu de sa minorité au moment des faits, sauf si la Cour d'Assises en décide autrement.
Ce jeune homme est de prime abord plutôt gentil, serviable et paraît avoir évolué positivement après sa première incarcération provisoire, mais il a commis 3 faits nouveaux pendant son contrôle judiciaire.
Les experts sont très pessismistes sur son évolution, pointant sa dangerosité précisémment en regard de son apparente docilité et de l'imprévisibilité de ses passages à l'acte.
Il faut bien l'avouer, le jeune H. fait peur.
Sa personnalité complexe et les expertises inclinent le Parquet à craindre une récidive et il réclame 15 ans de réclusion contre mon client, ce qui, cumulé avec les 5 ans déjà prononcés contre lui, constitue en fait la peine maximum, soit 20 ans.
Pour pouvoir réclamer autant, il sollicite le relèvement de l'excuse de minorité, estimant que tout a été fait pour ce jeune homme, que rien n'a marché et que dans ces conditions il n'y a rien qui puisse être prononcé d'autre que la peine maximale contre lui.
Je suis affligé par ces réquisitions, qui d'une part mettent totalement de côté le jeune âge de l'accusé (un majeur accusé de 15 viols en série n'aurait pas pu être condamné plus lourdement...) et d'autre part relèvent indemnes de toute responsabilité toutes les institutions qui ont failli dans l'accompagnement de cet enfant, puis adolescent difficile.
Le pire dans tout ça me semble résider dans le fait que pour sauver les apparences d'un système inefficace, tous les intervenants qui ont jalonné le parcours de ce gosse sont prêts à charger sa barque!
S'ils ont tous tout fait pour l'aider et que malgré cela il a fauté à plusieurs reprises, c'est la preuve irréfragable qu'il n'y a rien à racheter chez lui et la justification fondamentale à une sévérité exemplaire, voire unique.
En réalité, ni ses parents, ni les institutions habituelles (instituteurs, psychologues scolaires, juges des enfants, éducateurs, puis contrôleurs judiciaires) ne sont parvenus à endiguer le problème, ni à l'identifier réellement afin d'éviter le pire.
Sa prise en charge en tant qu'enfant en difficulté a manifestement été lacunaire, mais il est plus aisé de s'absoudre de toute responsabilité dans sa mauvaise évolution - et non dans ses exactions qui, elles, ne relèvent que de sa propre responsabilité - que de prendre sa part afin que son fardeau judiciaire reste supportable.
Cette part constitue pour moi l'excuse de minorité et c'est pour cela qu'il m'apparaît indispensable de l'en laisser bénéficiaire, comme tout mineur de son âge, en application de la loi.
Je ne vois pas ce qui motiverait le retrait de cette excuse légale et à dire vrai, rien dans les réquisitions du Parquet quasiment muettes à ce sujet, ne m'a convaincu.
La Cour d'Assises des Mineurs ne suit pas mon raisonnement et par là même, répond à ma question : le critère retenu pour ôter à mon client le bénéfice de l'excuse de minorité, que je n'avais pas lu dans la loi, serait la peur.
La peur qu'inspire un jeune homme que personne jusqu'ici n'est parvenu à cerner, preuve que le problème vient du plus profond de lui, pas de nous.
14 ans sur 15, 19 ans cumulés pour des faits commis entre ses 15 et ses 17 ans.
De la démesure ne peut naître l'équilibre dans lequel une bonne décision de Justice doit prendre source.